Thomas Noël Isidore Sankara est né le 21 décembre 1949 à Yako, autrefois Haute Volta, désormais Burkina Faso, dans une famille dont il est l’un des nombreux enfants. C’est un jeune militaire sorti de l’école d’Antsirabé à Madagascar qu’il quitte en 1973 pour revenir dans son pays. Il se politise dans les milieux politiques progressistes et sert en 1978 à la base de Po où Blaise Compaoré devient son adjoint. Il se marie en 1979 à Mariam Serme et après le coup d’État de colonel Sayé Zerbo, il est nommé capitaine en 1981 et dans la même année a son premier enfant et accepte d’être secrétaire d’Etat à l’Information dans le gouvernement. En novembre 1982 survient le coup d’État de Jean Baptiste Ouedraogo, et en janvier 1983 il devient premier ministre. Son dynamisme et son style dérangent les milieux bourgeois et, au lendemain de la visite de Guy, Penne conseiller de la présidence française, il est arrêté le 18 mai 1983. Les militaires sont divisés sur son sort et une faction, menée par Compaoré, et la jeunesse font pression et manifestent dans le pays pour sa libération. Libéré et assigné à résidence, il poursuit sa résistance contre le régime avec d’autres militaires qui finalement depuis Po, et rejoint par un pan de la jeunesse, marchent sur la capitale, libérent Sankara et le portent à la tête du pays le 4 août 1983.
Sankara a incarné l’espoir d’un changement révolutionnaire basé essentiellement sur la contribution des forces endogènes de ses concitoyens. Ce fut la dernière révolution africaine, interrompue dans le sang en 1987, alors qu’elle commençait à engranger des fruits prometteurs. Dans l’ancienne Haute –Volta qu’il renomma Burkina Faso, il a voulu rompre avec le mode néocolonial de croissance et la Françafrique. Thomas Sankara a, entre autres, privilégié l’agriculture et les paysans pour le sursaut national; voulu créer un marché intérieur de biens de consommation de masse accessibles et variés; tenté de satisfaire pour le plus grand nombre les besoins essentiels; contribué à l’émancipation de la femme et le changement des mentalités masculines; eu une gestion patriotique des deniers publiques; plaidoyé contre la dette et l’appauvrissement de l’Afrique en refusant la subordination qu’impose le système mondial et en appliquant un internationalisme agissant. Bref, beaucoup d’initiatives radicales et contraires à la norme en vigueur dans le système mondial. Il s’aliéna vite tous les tenants locaux, régionaux et internationaux, notamment du pré carré françafrique.
Vraisemblablement un complot international et local a assassiné Sankara en compagnie d’une dizaine de ses camarades le 15 octobre 1987. Le certificat de décès argue d’une «mort naturelle» -en même temps que 12 collègues- et aucune explication des circonstances de leur mort n’a jamais été donné; rien ne prouvait le lieu exact de sa sépulture, et aucune explication de son assassinat n’a jamais été donnée. Les présomptions pointent son meilleur ami, le ministre de la justice de l’époque et ensuite président du Burkina Faso, Blaise Compaoré ainsi qu’un un réseau de soutiens extérieurs. A 37 ans, comme Che Guevara, Sankara rejoignait le panthéon des révolutionnaires.